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POLITIQUE EN PACA & POLICY IN THE WORLD in English, French and Italian 0632173633 - diaconesco@gmail.com
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14 juin 2019

ARCHIVE : QUI SE SOUVIENT ENCORE DU SYSTÈME DE L'ANCIEN SÉNATEUR-MAIRE DE NICE JACQUES PEYRAT ( 1995-2008 ) ?

Le système Peyrat
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publié le  11/04/2002
 

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Boudé par Paris, mal aimé par sa ville d'adoption, le sénateur maire de Nice n'a pas su récupérer à son profit la formidable machine mise en place par Jacques Médecin. C'est aujourd'hui un homme blessé. Mais décidé à se battre.

 
En robe d'avocat, avec sa voix de stentor et son port de tête de consul romain, il impressionnait les jurés. Jacques Peyrat acquit ainsi une solide réputation assise sur des succès retentissants, comme l'acquittement de Dominique Poggi, l'un des chefs présumés des égoutiers du «casse du siècle».
Mais passer des prétoires à l'arène politique impose un changement de registre. Surtout lorsque l'on prétend jouer les premiers rôles. Cela suppose - vice ou vertu? - une souplesse qui n'est pas le principal trait de caractère du sénateur maire de Nice. Jacques Peyrat serait plutôt du genre raide dans ses rangers. Et pour cause: fils d'un officier réputé austère, officier lui-même, il a longtemps milité, l'esprit para en bandoulière, dans les rangs du Front national, le parti le plus discipliné qui soit. 
Parmi le personnel municipal comme dans la population, nombreux sont ceux qui, à Nice, lui reprochent sa morgue, sa suffisance, voire son mépris affiché à l'égard du vulgum pecus. A les entendre, en réalisant, sur le tard, le rêve de sa vie - devenir le premier magistrat de sa ville d'adoption - l'avocat n'aurait pas su s'adapter à des fonctions qui exigent de savoir séduire pour mieux convaincre. Son élection, vécue comme un couronnement, aurait au contraire accentué un penchant très militaire: couper court à tout dialogue et bannir la moindre contradiction. «On l'a vu, dans des réunions de comité de quartier, moucher sans ménagement ses contradicteurs, raconte l'un de ses détracteurs. Face à des situations conflictuelles, il devient agressif.» 
Les Niçois, habitués aux gestes amicaux, à la familiarité bon enfant et au verbe volontiers chaleureux de Jacques Médecin, supporteraient donc mal le ton cassant de «M. le Sénateur Maire». 
Les reproches ne s'arrêtent pas là. Jacques Peyrat, plus adjudant que chef de corps, ferait davantage preuve d'autoritarisme que d'autorité. Souvent indécis, il ne barrerait pas d'une main suffisamment ferme cet immense paquebot qu'est la mairie, avec ses 7 200 «matelots». 
Ce portrait à charge mérite sans doute d'être nuancé. Un élu de sa liste qui ne passe pas, loin s'en faut, pour un inconditionnel, parle de «carapace». «Ce n'est pas un vrai dur, un vrai méchant. Il n'a pas le coeur sec. Au contraire: il est trop gentil, il ne sait pas virer les gens. Ses airs de matamore cachent une grande timidité.» «Dans la forme, il commet des erreurs mais, sur le fond, c'est exactement le contraire», plaide son adjointe, Juliana Chichmanian-Delpy. 1995 avait marqué la première grande victoire politique de l'avocat. Sa liste «socioprofessionnelle» l'emportait brillamment - 13 000 voix d'avance - sur celle conduite par le tandem RPR appuyé par Paris, formé de Jean-Paul Baréty, maire sortant, et de Patrick Stefanini, directeur de cabinet d'Alain Juppé. 
Six ans et une mandature plus tard, patatras: le pénaliste Jacques Peyrat frôle la correctionnelle. Alors qu'il a fait le plein des soutiens officiels à droite, du RPR à l'UDF, en passant par DL et les amis de Philippe de Villiers, il ne gagne qu'avec 3 500 voix d'avance. Un score étriqué qui ne doit rien à la qualité de l'adversaire - une gauche plurielle déliquescente emmenée par Patrick Mottard, leader très contesté d'une fédération départementale du PS déchiquetée par les rivalités internes. 
Cette réélection étriquée sonne en fait comme un désaveu. Jacques Peyrat paie un déficit de popularité lié à son personnage public. Mais aussi, et surtout sans doute, à la mauvaise gestion d'un capital, occulte certes, mais bien réel, laissé en héritage par Jacques Médecin: une surpuissante machine à gagner les élections. 
Cette page d'histoire, encore secrète, mérite d'être racontée. Ecoutons donc l'un de ses principaux animateurs: «Nous avons travaillé pour Peyrat dès 1991. Sur ordre de Médecin. Il nous a dit: ?Allez avec Peyrat: c'est lui le prochain maire de Nice.'' Toute l'équipe mise sur pied par Max Gilly, l'homme de l'ombre, le maire bis, récolteur des fonds occultes et grand patron des colleurs d'affiches et des agents électoraux, a alors repris du service. L'élection de Peyrat a montré que, une fois de plus, Médecin avait vu juste. L'organisation, en 1998, de ses obsèques, que Jacques Peyrat a payées en grande partie de sa poche, nous a fait croire, au début, qu'il était le bon choix. Ensuite, nous avons déchanté...» Un temps, puis: «Jacques Médecin se promenait en ville et écoutait les doléances des Niçois, que Max notait soigneusement, reprend ce politologue de la rue. Le lendemain, chaque personne rencontrée recevait une photo dédicacée tandis que Max, toujours lui, faisait le tour des services municipaux pour s'assurer que les demandes exprimées étaient bien prises en compte. De plus, tous les jours, deux membres de l'équipe tournaient dans Nice à cyclo pour rapporter à Max ce qu'ils avaient vu et entendu. Lui se chargeait d'en faire bon usage. C'est comme cela que Médecin récoltait des voix...» 

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Or, à l'entendre, «Jacques Peyrat a tourné le dos à cette organisation» restée pourtant à son service après l'exil de Jacques Médecin en Uruguay. Dès lors, le divorce était consommé. Et cela de manière d'autant plus préjudiciable que le nouveau maire, en voulant mettre sur pied, avec ses propres hommes, une copie conforme du «système Médecin», n'a réussi qu'à en créer une pâle imitation. L'Entente républicaine du nouveau maire collectionne en effet les revers. Micheline Baus et Norbert Battini, fidèles entre les fidèles, mais aussi Max Baeza, Jérôme Rivière et, plus récemment, Gérard Bosio, tous soutenus par le maire de Nice, se sont inclinés lors de scrutins cantonaux a priori favorables. 

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Il faut ajouter à ces fiascos électoraux quelques couacs spectaculaires dans la gestion des affaires municipales, tels que le Festival des séries télévisées, le méga-concert de Cerrone ou le Festival de la glisse. On comprend dès lors que Jacques Peyrat ait du mal à vanter son bilan, malgré un redressement sensible des finances publiques et de grands projets comme le tramway ou la nouvelle mairie. 
Parce que son message passe mal, l'actuel maire de Nice peine à s'implanter dans cette ville qu'il a découverte en 1945. On comprend pourtant mieux l'authenticité de son attachement à la ville, généralement mis en doute, quand il consent à se confier: «J'avais 14 ans. Ma mère nous avait quittés et je vivais avec mon père et mon frère. J'ai vécu l'exode. Le petit garçon de Jeux interdits, c'était Jacky Peyrat. J'ai alors rencontré de vrais amis, comme Georges Labica et Michel Baret puis, plus tard, à la préparation militaire, Jean Hanot, devenu l'un des mes adjoints à la mairie.» Hervé Barelli, son conseiller en matière de «nissartitude», confirme ce désir d'intégration, profond et dénué de démagogie, qui l'a poussé à tenter de se familiariser avec la pratique du dialecte nissart et à favoriser toutes les opérations de protection du patrimoine et de maintien des traditions locales. 

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Mais son adhésion au RPR, dès 1998, n'a pas joué en sa faveur. D'abord parce qu'elle a été comprise par les Niçois, plus ou moins consciemment, comme le choix de Paris contre Nice. Une préférence aussitôt concrétisée par l'arrivée - imposée par l'état-major gaulliste? - d'une escouade de hauts responsables «parisiens», dont le moins que l'on puisse dire est qu'ils n'ont jamais fait l'unanimité. Particulièrement visé: Alain Belais, ancien collaborateur du ministre de la Coopération d'Alain Juppé, le RPR Jacques Godfrain, dont il a fait son directeur du cabinet. 
Jacques Peyrat justifie cet apport exogène par le fait que, lors de sa prise de fonctions en 1995, la mairie était «sous le choc». «J'ai paré au plus pressé en bouchant les trous», explique-t-il. Depuis peu, il a pris conscience de ce désamour et a entrepris de remplacer les «étrangers» par des «locaux». A la direction de la communication, Patrice Delage s'est ainsi retrouvé «placardisé» au profit de Bertrand de Camas, ancien responsable de la rédaction niçoise du groupe Nice Matin. Tandis que le secrétariat général adjoint de la mairie a vu le retour en grâce de Lucien Pampaloni. 

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Mais ce que Jacques Peyrat, dans son for intérieur, ne parvient pas à admettre, c'est l'ingratitude affichée à son égard par les caciques du RPR. Il offre aux gaullistes, lui le farouche partisan de l'Algérie française, un cadeau royal: la cinquième ville de France, désormais principal fief, avec Bordeaux, du mouvement chiraquien en France, après la perte de Paris. Il embauche quelques laissés-pour-compte de la cohabitation. Il accepte tous les diktats parisiens lors du renouvellement de sa liste en 2001 - «Il est allé à Canossa», témoigne l'un de ses anciens adjoints, Serge Ferrand. Et, en remerciement, les «pontes» du RPR, Jacques Chirac en tête, continuent de le garder à distance! Le président-candidat préfère ainsi tenir meeting à Marseille qu'à Nice. Et Patrick Devedjian le contredit sans ambages lorsqu'il se prononce pour la réouverture du débat sur la peine de mort. Parce qu'on ne lui pardonne pas son appartenance passée au Front national. 
Alors, malgré un amour-propre blessé, Peyrat s'emploie à obtenir dans les Alpes-Maritimes la reconnaissance qu'on lui refuse à Paris. C'est le sens de son «alliance politique très forte», selon ses propres termes, avec Christian Estrosi, député et secrétaire départemental du RPR. Les deux hommes se sont partagé les rôles. A Estrosi la présidence du conseil général en 2004, à Peyrat celle de la communauté d'agglomération. L' «agglo», sa grande réussite. Une manière de concrétiser, en politique, une profession de foi très intimiste. «A l'école, puis au lycée, j'ai trop souffert de ne pas être complètement niçois. J'ai trouvé ici mes racines. Je ne veux pas les perdre une seconde fois.»  
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