par Antonin Campana.
Hier au soir, j’étais à une réunion d’un important collectif de résistants au covidisme. Il ressort des avis et discussions que j’ai pu entendre que personne, dans ce collectif, n’est dupe de l’ignoble propagande antirusse qui se développe dans « nos » médias. Globalement, à ce que je vois et d’après ce que me rapportent mes contacts, ceux qui résistent aux injections résistent plutôt facilement à la propagande antirusse, alors que ceux qui se sont soumis aux injections sont les mêmes qui adhèrent aujourd’hui à cette propagande. Mouton un jour, mouton toujours. Faire un lien entre le covidisme et la guerre en Ukraine, entre le sanitaire et le militaire, peut néanmoins paraître osé. En fait pas tant que çà, puisque l’un et l’autre peuvent relever d’une stratégie du choc.
On le sait, pour contrôler les populations et faire passer ses réformes économiques et politiques (Great Reset), l’oligarchie a besoin d’entretenir la peur et de répandre la terreur (stratégie du choc). Or, l’opération covidiste semble s’essouffler depuis plusieurs mois déjà. Début novembre 2021, l’ATIH a par exemple révélé les vrais chiffres des hospitalisations covid en 2020 (2%), ce qui signifiait la fin inéluctable de la comédie. Le variant Omicron apparu vers la même époque en Afrique a rendu plus difficile la poursuite du récit covidiste. En bref, il est probable que les instances oligarchiques avaient déjà anticipé un changement de paradigme, sans doute dès le début de 2021. La stratégie du choc devait donc se « réinventer ». On observera que l’essoufflement du narratif covidiste coïncide avec un regain de pression exercé sur la Russie et un retour plus musclé des tensions à l’Est. Simple coïncidence ? Peut-être pas.
Regardons les faits.
En huit ans, les bombardements ukrainiens sur le Donbass ont fait 14 000 morts. En 2019, des obus tombent encore quasiment tous les jours sur l’enclave séparatiste. Puis en 2020, alors que l’opération covidiste commence, les bombardements cessent brutalement. Sputnik notera ainsi, objectivement, que la « situation [a été] plutôt calme en 2020 ». La « communauté occidentale », « l’axe des gentils » si l’on veut (cf. le Saker parle fort justement de « l’axe de la gentillesse »), est-il alors trop occupé par le déroulement du plan Covid… ou est-ce simplement fortuit ?
Les tensions vont reprendre en octobre-novembre 2021, au moment précis où la farce covidiste apparaît partout pour ce qu’elle est… et où s’opère aussi les premiers retournements de veste.
Qui est à l’origine de ces tensions ?
En octobre 2021, l’OTAN expulse huit diplomates russes. En octobre toujours, l’UE projette de mettre en place une « Mission de conseil et d’entraînement militaire en Ukraine ». Moscou de son côté lance un appel pour que l’OTAN cesse ses livraisons d’armes à l’Ukraine.
Le 8 novembre, les États-Unis réactivent un « commandement d’artillerie » basé en Allemagne (le 56e Commandement, qui avait été dissous en 1991) sur fond de tensions OTAN-Russie en raison de l’expulsion des diplomates russes (fin du dialogue officiel Russie-OTAN). Le 10 novembre, la Russie avertit les États-Unis contre la livraison d’armes à l’Ukraine. En réponse, CNN fait savoir quelques jours plus tard que les États-Unis vont envoyer de nouveaux armements en Ukraine (23 novembre).
En décembre, l’activité militaire états-unienne en mer Noire s’intensifie près des frontières russes. Les autorités russes expriment leur préoccupation et parlent de « provocations ». Biden, quant à lui, révèle qu’il compte envoyer directement des troupes en Ukraine (11 décembre) avant de se rétracter et de promettre de grossir les rangs de l’OTAN mais aussi d’accentuer les sanctions à l’égard de la Russie.
En janvier 2022, l’Axe des gentils fomente une révolution de couleur au Kazakhstan. En soutien, l’UE demande le « respect du Droit » pendant que le MI6 britannique tente de renouveler Maïdan. Pour la Russie, le Kazakhstan est stratégique (site spatial de Baïkonour…) et ne peut tomber dans l’escarcelle états-unienne. L’OTSC intervient et rétablit la situation.
Fin janvier, en Ukraine, des instructeurs américains sont photographiés sur un champ de tir à Lviv. Ils sont en train de former des soldats ukrainiens aux techniques antichars (photos publiées par la Daily Mail). Plusieurs centaines de militaires états-uniens mais aussi des unités militaires clandestines et des mercenaires de la société Academi-Blackwater sont présents en Ukraine depuis 2015. Ils équipent et entraînent l’armée ukrainienne aux côté de soldats de l’OTAN. Le 12 février 2021, le commandement états-unien ordonne le retour au pays de 160 de ses soldats. Le 13 février, un sous-marin nucléaire US est chassé des eaux territoriales russes.
Coté Donbass, la tension augmente à partir du 17 février. Les tirs ukrainiens sur le Donbass reprennent le 19 février. 204 obus de calibres interdits sont tirés en une seule nuit. Le 20 février au matin, l’armée ukrainienne tente de percer les lignes de défense de la milice populaire de la République populaire de Lougansk. Le Conseil de Sécurité de la Fédération de Russie se réunit d’urgence.
Le 24 février, les troupes russes entrent en Ukraine.
En résumé, nous voyons clairement que les pressions sur la Russie, qui augmentent depuis 20 ans, font une pause en 2020 jusqu’en octobre-novembre 2021. L’année covidiste 2020 et les premiers mois de l’année 2021 ont été particulièrement calmes, mise à part la tentative de révolution de couleur en Biélorussie, opérée par l’OTAN depuis la Pologne en août 2020. La reprise des pressions aux frontières de la Russie (mer Noire, Kazakhstan, Biélorussie, Ukraine, Donbass) ne laissait donc aucun doute à la Russie sur les intentions de l’Axe des gentils. On peut dire que la Russie a été amenée à la guerre par un processus augmentant en intensité et devant aboutir à des hostilités ouvertes selon un timing qui avait été choisi pour devenir intolérable aux Russes courant 2022. Comme sur un échiquier, le déplacement de chaque pièce avait été prévu longtemps à l’avance, dans les moindres détails. Fait significatif, le 4 février l’agence de presse américaine Bloomberg faisait paraître accidentellement un article pré-écrit annonçant : « La Russie envahit l’Ukraine » ! Tout était donc en place pour que la Russie intervienne et se trouve ainsi, dans l’esprit des états-uniens, en « échec et mat ». L’Ukraine, quant à elle, n’est que l’appât destiné à être mangé par le gros poisson. Au nom de leurs intérêts, les États-Unis vont la sacrifier sans remords.
L’objectif de l’OTAN était donc que, psychologiquement, la Russie se sente cernée (elle l’était dans les faits, on l’a vu). À partir de là, la « mémoire » ferait son travail. Il faut relire le discours de Vladimir Poutine du 24 février 2022 pour le comprendre. Voilà ce que dit le président Russe :
« La tentative d’amadouer l’agresseur à la veille de la Seconde guerre mondiale a été une erreur qui a coûté cher à notre peuple. Dans les premiers mois de combats nous avons perdu des territoires gigantesques et d’une importance stratégique, et des millions de vies humaines. Nous ne ferons pas une telle erreur une seconde fois, nous n’en avons pas le droit ».
Autrement dit : nous ne laisserons pas l’initiative de l’attaque à l’ennemi, nous attaquerons préventivement. Les « stratèges » des États-Unis et de l’OTAN ont-ils si peu de culture historique qu’ils ignoraient que par leur action ils plaçaient la Russie dans la même situation qu’en 1941 ? Pouvaient-ils ignorer que par nécessité vitale (une « question de vie ou de mort » dit Poutine) la mémoire russe commanderait d’attaquer maintenant au risque de se soumettre à jamais ? C’est peu probable !
Donc une question se pose : quel est l’intérêt des États-Unis, ou plutôt de l’oligarchie qui dirige l’Axe des gentils ?
Il est double :
D’une part perpétuer la stratégie du choc pour contrôler les populations, nous l’avons dit.
D’autre part, faire en sorte que l’Europe et la Russie se neutralisent mutuellement dans une guerre économique, voire militaire, en tous cas fratricide : une guerre en Europe ! Par deux fois, cela a si bien réussi aux États-Unis ! La Russie écartée, c’en serait fini des peuples et des États nationaux. Les États-Unis pourraient s’occuper de la Chine, soit pour la détruire, soit, au terme d’un nouveau Yalta, pour se partager le monde avec elle.
Un paramètre de l’équation semble toutefois échapper aux stratèges états-uniens. La Russie a parfaitement perçu que l’Ukraine était activée par les États-Unis. Vladimir Poutine n’est pas en guerre contre l’Ukraine, dont il ménage pour l’instant la population, mais contre les États-Unis. La Russie ne disparaîtra pas de la scène mondiale sans avoir envoyé ses bons souvenirs nucléaires au pays de l’oncle Sam.
Rien n’est encore joué.
source : Autochtonisme
PUBLIÉ PAR JEAN-PATRICK GRUMBERG LE 3 MARS 2022
Voici la traduction de l’analyse géopolitique de Tong Zhao* sur les choix lourds de conséquences, tant pour Pékin que pour le monde, que la Chine pourrait suivre.
La Chine n’a probablement pas su prévoir la guerre. Même de nombreux hauts responsables russes des services de renseignement et de l’armée, ainsi que de nombreux experts russes de haut niveau, n’ont pas semblé prévoir la guerre. Compte tenu de sa profonde méfiance à l’égard des États-Unis, la Chine a probablement considéré les informations partagées par les États-Unis [que Poutine allait envahir l’Ukraine, comme je l’ai indiqué sur Dreuz contrairement à mes confrères], comme une guerre psychologique destinée à semer la discorde.
La Chine n’a pas non plus réussi à prévoir la forte réaction internationale ni à apprécier pleinement ses implications pour elle, d’où l’absence de réajustement rapide et efficace de sa position publiquement favorable à la Russie.
Pour simplifier, la Chine est confrontée à deux voies stratégiques pour l’avenir.
- L’option 1 consiste à poursuivre et même à redoubler d’efforts pour s’aligner étroitement sur la Russie afin de promouvoir l’ordre et la stabilité dans le monde de la manière qu’elle l’envisage, sans limites supérieures, sans zone interdite et sans ligne d’arrivée.
- L’option 2 consiste à saisir l’occasion pour améliorer les relations avec l’Occident (en particulier les États-Unis), en faisant bon usage de l’intérêt croissant des pays occidentaux pour empêcher un bloc Chine-Russie. Après tout, la Chine souhaite vivement des relations stables avec les États-Unis et l’Occident, mais doute de leur engagement.
La commémoration très médiatisée par la Chine du 50e anniversaire de la visite de Nixon à Pékin est la manifestation la plus récente de ce désir chinois. Il est largement admis que l’accès aux technologies et aux marchés occidentaux restera essentiel pour l’essor continu de la Chine à court et moyen terme. [j’ajouterai le vote d’abstention de la Chine a la résolution non-contraignante de l’Assemblée générale de l’ONU condamnant la Russie, et sa proposition, fin de semaine dernière, d’intervenir comme médiateur pour ramener le calme entre l’Ukraine et la Russie].
Il pourrait s’agir d’un moment charnière, car la manière dont la Chine fera ce choix stratégique aura les conséquences géopolitiques les plus profondes pour l’avenir de la Chine et la paix et la stabilité internationales.
La plus grande incertitude est de savoir comment le petit cercle décisionnel fermé et opaque de la Chine – avec le leader suprême Xi JINPING au centre – voit les choses et fait ses choix. La guerre en Ukraine a montré comment le petit cercle fermé et frivole de Poutine a finalement déterminé la guerre et la paix.
La question est plus importante en Chine, car le pouvoir est plus centralisé sous la direction d’un seul dirigeant. À part KJU [NDLR Kim, le leader Nord-Coréen], il n’y a probablement pas de troisième personne au monde qui jouisse d’une autorité aussi absolue et d’une flatterie aussi écrasante pendant autant d’années. Comment cela affecte-t-il la mentalité/psychologie d’une personne ? Nul ne le sait.
Les observateurs ont souligné qu’en Chine, le Grand Pare-feu est beaucoup plus élevé qu’en Russie ; il y a également moins de société civile, une gestion plus stricte de la pensée/perception du public, moins de débat politique ouvert, moins de remise en question du récit national, et aucune opposition. En d’autres termes, moins de contrôles, et d’équilibres internes.
Ainsi, malgré l’attrait de l’option 2 pour certains experts, M. Xi pourrait bien finir par pencher pour l’option 1. Comme l’ont souligné les observateurs, il partage la vision du monde de Poutine et pense que l’inévitable changement structurel de l’équilibre international du pouvoir détermine la rivalité Chine-Occident.
Sa solution pour éviter une confrontation potentiellement violente consiste à donner la priorité au renforcement de la puissance matérielle, y compris la modernisation accélérée de l’armée et l’expansion nucléaire. Le fait qu’il ait récemment prêché l' »esprit de combat » aux jeunes cadres du Parti ne montre aucun réajustement de cet état d’esprit.
Le fait que le lien personnel entre Poutine et Xi ait été l’un des principaux moteurs de la relation bilatérale, et que M. Xi ait apparemment mis tout son poids dans la balance, rend plus difficile un changement radical de l’approche de la Chine vis-à-vis de la Russie, car les experts chinois pourraient ne pas vouloir critiquer la sagesse de la politique actuelle.
La Chine est probablement très choquée de voir les pays occidentaux massacrer l’économie de la Russie et isoler le gouvernement de Poutine. Il jure probablement de ne jamais permettre que cela se produise sur lui-même.
Cela pourrait renforcer la préférence de longue date de M. Xi pour l’autosuffisance & l’autarcie, estimant que la Chine doit être en mesure d’empêcher un étranglement extérieur. Cela pourrait limiter la capacité de la Chine et de l’Occident à empêcher le découplage et à développer des relations mutuellement bénéfiques et interdépendantes.
À cela s’ajoute l’écart croissant de perception stratégique au niveau sociétal entre la Chine et l’Occident.
- Une bulle d’information de longue date crée des univers parallèles où les deux peuples sont en désaccord sur des questions factuelles fondamentales.
- Étant donné que les experts chinois estiment que la guerre en Ukraine résulte de la complicité des États-Unis, et que les médias d’État adoptent massivement les récits russes, il est difficile de s’attendre à ce que la communauté des experts, les leaders d’opinion ou le grand public défendent fermement l’option 2.
La guerre en Ukraine montre à quel point le manque d’information et de perception peut constituer une menace fondamentale pour la paix internationale, mais ce problème ne fait que s’aggraver entre la Chine et l’Occident.
Pour les chercheurs, la leçon clé à tirer de tout cela est la suivante : il est extrêmement important pour la recherche future sur la paix internationale et la stabilité stratégique, de bien comprendre l’impact de l’environnement décisionnel national sur l’élaboration de la politique étrangère et de sécurité d’une superpuissance opaque.
En ce qui concerne la guerre en Ukraine, la Chine prendra probablement le temps d’attendre que le chaos total perçu se calme et que le nouveau paysage géopolitique mondial se clarifie, avant de procéder à des changements politiques significatifs. Dans l’intervalle, ses positions publiques resteront probablement génériques et abstraites.
Mais le choix que Pékin fera à l’issue de cette crise sera lourd de conséquences.
Il faut espérer que des débats approfondis entre les experts chinois, et entre experts chinois et internationaux, pourront aider les gens à réfléchir à ces questions, et donc à promouvoir le bon choix.
Traduction et adaptation, Jean-Patrick Grumberg
Tong Zhao
* Tong Zhao est chercheur principal au sein du programme de politique nucléaire du Carnegie Endowment for International Peace.
Ses recherches portent sur les questions de sécurité stratégique, telles que la politique en matière d’armes nucléaires, la dissuasion, le contrôle des armements, la non-prolifération, la défense antimissile, les armes hypersoniques, ainsi que la sécurité et la politique étrangère de la Chine.
Il est membre du conseil d’administration du Asia-Pacific Leadership Network for Nuclear Non-Proliferation and Disarmament et du conseil consultatif de la Missile Dialogue Initiative.
Zhao est également rédacteur en chef adjoint de Science & Global Security et membre de l’International Panel on Fissile Materials.
Auparavant, il a été chercheur principal sur la sécurité nucléaire à l’université de Harvard, chercheur non-résident au Pacific Forum, et a travaillé pour le bureau des Affaires étrangères du gouvernement populaire de la municipalité de Pékin.
Il est titulaire d’un doctorat en sciences, technologies et affaires internationales de l’Institut de technologie de Géorgie, d’une maîtrise en relations internationales et d’une licence en physique de l’Université de Tsinghua.
Il est l’auteur de « Tides of Change : China’s Nuclear Ballistic Missile Submarines and Strategic Stability » et « Narrowing the U.S.-China Gap on Missile Defense : How to Help Forestall a Nuclear Arms Race ».